Communiqué
Pourquoi divorce-t-on ?
26 juillet 2011
Qu’est-ce qui nous pousse à divorcer ? Les causes ne manquent pas, semble montrer l’étude menée par une sociologue de l’Université de Neuchâtel. Ce canton caracole d’ailleurs en tête de tous les palmarès de divorces en Suisse. En cette période qui fleure bon la plage, l’huile solaire, les rencontres et la canne à pêche, pourquoi ne pas pousser un peu plus loin le bouchon et regarder une fois en face les causes qui poussent au divorce ?
Les enfants étaient jusqu’à présent considérés comme le ciment du couple. On pense aujourd’hui au contraire qu’ils n’empêchent en rien le divorce. Au mieux, ils le retardent ! Souvent sources de stress, les enfants peuvent en effet contribuer à la scission du couple. Ne serait-ce que par le domaine émotionnel qu’ils représentent. Un domaine où deux passés culturels se confrontent.
Assistante à l’Institut de sociologie, Fabienne Stettler s’intéresse aux causes du divorce. Non pas à celles liées au domaine de la psychologie. La jeune femme traque les macro-causes du divorce. « Ma thèse de doctorat encore en cours ne me permet pas de livrer des explications toutes faites », avertit-elle d’entrée. La sociologue est cependant suffisamment avancée dans ses recherches pour fournir une série de réflexions tout à fait intéressantes, basées à la fois sur l’analyses des chiffres délivrés par les statistiques et sur les études d’autres collègues, parfois issus de disciplines sœurs, comme l’histoire de la famille.
Les enfants ne représentent heureusement pas la cause majeure de divorce. La religion et l’âge figurent parmi les macro-causes les plus significatives. Les protestants divorcent en effet davantage que les catholiques, qui eux-mêmes divorcent plus que les musulmans, également plus enclins à divorcer que les Juifs. Pour ce qui est de l’âge, c’est après quatre ans de mariage que le plus grand nombre de couples qui divorcent passent à l’acte. A noter au passage que le risque est plus élevé dans les couples formés récemment que dans ceux des anciennes générations.
Pour Fabienne Stettler, il s’agit de procéder avec prudence. « Ces deux facteurs de religion et d’âge présentent chacun de gros biais. Pour la religion, par exemple, certaines personnes qui ne croient en rien sont considérées comme catholiques simplement du fait qu’elles sont nées de personnes catholiques. De même, il est difficile de distinguer ce qui fait tenir des couples mariés depuis soixante ans. Est-ce à cause du temps passé ensemble ou de l’époque à laquelle ces deux conjoints appartiennent ? »
Toujours à propos du facteur « âge », un grand écart à l’intérieur du couple semble le fragiliser, surtout si la femme est l’aînée. La doctorante a également eu la surprise de relever une grande constante. Dans les couples, les hommes sont en moyenne toujours deux ans plus âgés que leur femme, et ce depuis au moins les années 1950 !
Fabienne Stettler a également observé une différence entre les milieux urbains et ruraux, ces derniers divorçant moins, probablement à cause du contrôle social plus fort. Plus surprenant, les grossesses avant mariage ne semblent avoir aucune incidence. Au contraire des enfants nés d’une union précédente qui ont tendance à faire augmenter le nombre de divorces.
Pour rester au registre des bambins, les spécialistes ont démontré que la courbe des divorces atteint un sommet au moment où le dernier enfant de la famille a entre trois et cinq ans. La sociologue avance une prudente interprétation. « Les parents sont souvent bien trop occupés les premières années, quand les enfants sont encore tout petits. Vers quatre ans, l’enfant devient autonome. Il n’est plus aussi dépendant de ses parents que le nourrisson, il entre dans le système social par l’école, ce qui libère les parents d’une certaine pression. »
Un deuxième tournant survient lorsque l’aîné de la fratrie arrive à vingt ans. Pour Fabienne Stettler : « C’est la fin de la scolarité, le début de la vie active et souvent le déménagement de l’appartement familial. Cette étape peut provoquer une sorte de relâchement de la part des parents. Si le premier de leurs enfants parvient à voler de ses propres ailes, les autres devraient y arriver aussi. »
Avec un tel sujet de thèse, Fabienne Stettler passe-t-elle pour une spécialiste des relations de couple au sein de son entourage ? « Pas du tout. J’attire tout au plus les confidences, mais pas au point d’aborder directement le thème du divorce. Comme si en parler suffisait déjà pour attirer le mauvais sort », dit en riant l’intéressée.
Contact
Fabienne Stettler
assistance en sociologie à l’Université de Neuchâtel
tél. 032 718 14 18 (l’après-midi)
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