Communiqué

Des micro-algues favorisent la biodiversité des sols

16 mai 2017

Les algues unicellulaires ne se développent pas que dans l'eau. Dans les écosystèmes terrestres, elles constituent une source de carbone organique plus importante qu’imaginée jusqu’à présent, favorisant la biodiversité de ces milieux. Cette découverte des chercheurs du Laboratoire de biodiversité du sol de l’Université de Neuchâtel est publiée dans la revue Soil Biology & Biochemistry. Elle jette une nouvelle lumière sur le cycle des nutriments dans le sol et sur les risques liés à l’emploi d’herbicides.

On pourrait naïvement penser que les algues ne se développent que dans les écosystèmes aquatiques. Or, c'est faux. On en trouve à la surface de tout type de sol, même dans les milieux arides. « Pour autant qu'il y ait de la lumière et un peu d'eau, même par moments, des algues peuvent survivre, explique le professeur Edward Mitchell, directeur du Laboratoire de biodiversité du sol, En forêt, on en trouve moins que dans les zones plus ouvertes, car il y a moins de lumière. D'une taille généralement comprise entre un centième et un dixième de millimètre, ces algues unicellulaires ne sont visibles qu’au microscope. »

Pour mettre en évidence leur importance dans les milieux terrestres, les chercheurs ont procédé à un séquençage massif d’ADN des micro-organismes vivant en Suisse dans des prairies, des cultures et dans des sols de forêts. Ce travail, qui fait partie de la thèse de doctorat que soutiendra cet été Christophe Seppey, montre pour la première fois quantitativement le rôle que jouent ces algues unicellulaires dans la chaîne alimentaire des micro-organismes du sol, apportant une contribution importante à la richesse en espèces des écosystèmes terrestres.

«On observe une corrélation entre le nombre de protistes phagotrophes, par exemple certaines amibes prédatrices, et l'abondance de ces algues unicellulaires», indique Edward Mitchell. Cela suggère l'existence d'une relation trophique étroite entre ces organismes, c'est-à-dire le fait que ces protistes phagotrophes se nourrissent de ces algues unicellulaires.

La difficulté de mettre en évidence cette relation particulière vient de ce que les algues ne sont pas très abondantes. Elles peuvent en revanche se reproduire rapidement sitôt que les conditions deviennent favorables. Cependant, si elles sont consommées à mesure qu'elles se multiplient, il devient impossible d'identifier le rôle qu'elles jouent dans la chaîne alimentaire des sols des milieux terrestres. Dans les écosystèmes aquatiques, c'est d'ailleurs un peu pareil. La biomasse du zooplancton (micro-crustacés, par exemple) est souvent supérieure à celle du phytoplancton (algues, diatomées, etc.). En d’autres termes, la pyramide alimentaire est inversée !

La découverte jette une nouvelle lumière sur le cycle des nutriments dans le sol. Elle prend également toute son importance quand on songe à la sensibilité de ces algues aux herbicides. «Comme elles ne sont pas très abondantes naturellement, leur diminution ou disparition pourrait passer inaperçue, avertit Edward Mitchell. Or si, comme nos résultats le suggèrent, elles contribuent d’une manière significative à l’apport de carbone organique des sols, celui-ci s'en trouvera diminué en cas d'exposition aux herbicides. Avec des conséquences négatives pour la fertilité des sols, ainsi que pour la diversité et l’abondance des organismes du sol en général.»

Le communiqué au format pdf

Contact :

Prof. Edward Mitchell
Directeur du Laboratoire de biodiversité du sol
Tél. +41 32 718 23 45
[email protected]

 


Christophe Seppey
Laboratoire de biodiversité du sol
Tél. +41 32 718 31 08
[email protected]

 

En savoir plus :

Seppey C.V.W., Singer D., Dumack K., Belbahri L., Mitchell E.A.D., Lara E., «Distribution patterns of soil microbial eukaryotes suggest widespread algivory by phagotrophic protists as an alternative pathway for nutrient cycling», Soil Biology & Biochemistry, 112, p. 68-76, 2017.

Doi: http://dx.doi.org/10.1016/j.soilbio.2017.05.002