Communiqué
Lutte contre la drogue : stupéfiantes contradictions ?
24 janvier 2012
Une société sans drogue existe-t-elle ? « Davantage de répression », est-ce la bonne solution ? La légalisation totale est-elle envisageable ? Deux assistants en droit de l’Université de Neuchâtel dressent un portrait sans complaisance de la lutte contre la drogue. Leur point de vue, avant tout juridique, se décline en vingt-et-une questions. Leur ton légèrement provocateur cadre bien avec l’esprit de la collection « la quest¿on » des éditions de l’Hèbe.
La Suisse investit les deux tiers des ressources affectées à la lutte contre la drogue dans la répression et 4.3% seulement au volet préventif. Selon l’OMC, le trafic de drogue serait le troisième commerce en importance dans le monde, après le pétrole et l’alimentation. Ce marché peut compter sur un climat de concurrence aussi intense que sauvage, sur des produits très peu périssables, sur l’absence de taxes et d’impôts, ainsi que sur des consommateurs dépendants. Un marché fantastique, accessible même sans un grand capital à disposition… et que nous pourrions peut-être casser à l’aide de légalisations !
Avec leur ouvrage à peine plus lourd qu’un moineau, les deux assistants en droit pénal de l’Université de Neuchâtel, Ludivine Ferreira et Alain Barbezat, jettent pourtant un pavé dans la mare. Lutte contre la drogue : stupéfiantes contradictions ose quelques prises de position pour le moins remuantes. « Ouvrez grand votre esprit et affranchissez-vous des raisonnements émotionnels », avertissent les deux auteurs en préambule. Les vingt-et-une questions qui suivent et constituent l’ouvrage montrent en effet à quel point la répression a échoué dans sa tentative de résoudre le problème de la drogue. Le cas n’est pas sans rappeler la prohibition de l’alcool du début du XXe siècle. Cet échec a également été relevé en juin 2011 par la Commission mondiale des politiques de lutte en matière de drogue qui compte parmi ses membres quatre anciens présidents, l’ancien secrétaire général des Nations Unies (Kofi Annan), l’ancien secrétaire général de l’OTAN (Javier Solana) ou encore l’ancienne haute commissaire aux droits de l’homme (Louise Arbour).
Les deux assistants de droit pénal entrevoient au contraire une piste potentielle du côté de la libéralisation des stupéfiants. « Notre but n’est pas de prôner une société de la défonce », se défendent-ils. Le livre qu’ils publient n’entend pas faire l’apologie des drogues, ni même considérer positivement leur consommation. Les auteurs constatent simplement qu’il est illusoire de rêver d’une société sans drogue et qu’il vaut mieux vivre avec. Le Portugal leur fournit un cas d’étude particulièrement intéressant. En novembre 2000, le gouvernement de ce pays a légalisé « la consommation et la détention pour usage de toutes les drogues, dans des quantités établies par la loi ». Une dizaine d’années plus tard, le Portugal ne s’est toujours pas transformé en « Eldorado de la drogue », comme le prédisaient certains. Bien au contraire…
Publié dans la collection « la quest¿on » des éditions de l’Hèbe, l’ouvrage suscite la réflexion, adopte volontiers un ton provocateur et apporte un éclairage à la fois rigoureux et insolite.
Contact :
Ludivine Ferreira
assistante à la chaire de droit pénal et de criminologie de la Faculté de droit de l’Université de Neuchâtel
tél. 032 718 13 03
[email protected]
Alain Barbezat
Greffier-rédacteur au Tribunal des mesures de contrainte et d'application des peines du canton de Vaud et doctorant en droit pénal à l’Université de Neuchâtel
[email protected]
Ludivine Ferreira, Alain Barbezat, Lutte contre la drogue : stupéfiantes contradictions ? Les Editions de l’Hèbe, « la quest¿on », 2011 ISBN 978-2-88906-037-5