Communiqué
L'erreur médicale des hôpitaux sous la loupe de l'UniNE
11 septembre 2013
Chaque année en Suisse, 1500 à 2000 personnes décèdent dans les hôpitaux en raison d’erreurs médicales. Ce chiffre dépasse le nombre d’issues fatales cumulées des accidents de la route, du cancer du sein et du sida. Directeur de l’Institut de droit de la santé (IDS) de l’Université de Neuchâtel qui fêtera ses vingt ans d’existence les 19 et 20 septembre prochain, le professeur Olivier Guillod a lancé une recherche sur le sujet en convoquant les associations de médecins, de patients et du milieu hospitalier pour remédier à ce fléau. Son projet* vient d’obtenir un subside de 177’000 francs du Fonds national suisse pour deux ans.
«Vu leur ampleur, les erreurs commises par des professionnels de la santé, spécialement en milieu hospitalier, sont désormais reconnues comme un véritable problème de santé publique, constate Olivier Guillod. Il est donc essentiel de se demander si tous les efforts destinés à réduire un tel tribut ont bien été entrepris par tous les acteurs concernés, y compris le législateur.»
La sécurité des patients reste en effet une problématique trop peu discutée en Suisse, en comparaison à d’autres pays occidentaux, notamment d’Amérique du nord. « Et les juristes sont pour le moment restés largement à l’écart de ces débats. Pourtant, le droit peut apporter une contribution significative à la réduction des erreurs médicales », poursuit Olivier Guillod.
Trop longtemps, le respect de la blouse blanche a contribué à amplifier le phénomène. «Un bon médecin ne se trompe jamais», avait-on coutume d’entendre. Or, comme dans n’importe quelle profession, les erreurs existent et sont souvent imputables à un malheureux concours de circonstances. Tel est le cas de ce patient à qui un médecin avait administré un médicament inadéquat. Le praticien avait saisi machinalement le flacon d’un emplacement de l’armoire où il avait l’habitude de le trouver. Manque de chance : les armoires en pharmacie avaient été réorganisées quelques jours auparavant durant lesquels ledit médecin était en vacances. Et n’avait donc manifestement pas encore pris connaissance de l’information diffusée sur la nouvelle disposition des armoires. Reste qu’évidemment le praticien aurait dû contrôler l’étiquette pour s’assurer du bon produit à administrer. Mais dans l’urgence, il avait omis cette précaution de base.
L’analyse prônée par Olivier Guillod portera en particulier - mais pas uniquement - sur l’opportunité de réviser les règles juridiques (au niveau fédéral ou cantonal) gouvernant la responsabilité médicale et hospitalière. L’objectif principal consiste à encourager une culture de l’erreur, à l’image de ce qui se pratique dans l’aviation, où tous les incidents, y compris les «near miss» c’est-à-dire qu’un événement imprévu a créé un danger, mais sans que ce dernier se matérialise, sont répertoriés et analysés.
L’erreur, une source d’apprentissage
Plutôt que de se focaliser sur le reproche moral et professionnel que constitue encore la faute dans le système actuel de responsabilité, il faudrait se concentrer sur l’indemnisation des victimes et envisager l’erreur comme une source d’apprentissage. Cela passe à la fois par des modifications de la formation des professionnels de la santé, par l’introduction de systèmes d’annonce et d’analyse des incidents et par des aménagements du régime de responsabilité médicale et hospitalière. Le canton du Valais a déjà montré la voie, en ancrant récemment dans sa loi sur la santé la mise en place d’un système d’annonce et d’analyse des incidents médico-hospitaliers. Il reste à améliorer les processus et les modalités d’indemnisation des victimes et de leurs familles. Parmi les solutions testées à l’étranger, le projet examinera la création d’un fonds d’indemnisation.
Enfin, le dialogue est au centre du projet de recherche, puisqu’un groupe d’accompagnement réunira des représentants de la Fédération des médecins suisses (FMH), la Fédération des hôpitaux (H+) et la Fondation pour la sécurité des patients. Le panel sera complété par des experts étrangers venus de France, de Belgique et d’Italie. Les résultats sont attendus d’ici l’été 2015.
Célébration du 20e anniversaire de l’Institut de droit de la santé :
Conférence publique (entrée libre)
Aula des Jeunes-Rives, Espace Louis-Agassiz 1, Neuchâtel
Jeudi 19 septembre de 17h à 19h
Marcel Tanner, directeur du Swiss Tropical and Public Health Institute, Bâle
Les défis actuels de la santé publique
Laurent Kurth, Chef du Département des finances et de la santé, Neuchâtel
Les réponses du système de santé suisse
Débat animé par Nicolas Willemin, rédacteur en chef, L’Express
Colloque scientifique (sur inscription préalable)
Aula des Jeunes-Rives, Espace Louis-Agassiz 1, Neuchâtel
Vendredi 20 septembre 2013
Renseignements : www.unine.ch/ids
Contact :
Prof. Olivier Guillod
Directeur de l’Institut de droit de la santé
Tél. : 032 718 12 80
[email protected]
En savoir plus :
*Projet FNS : Gestion des risques cliniques et responsabilité médico-hospitalière.
Requérant : Olivier Guillod ; Période 01.07.2013 - 30.06.2015, Montant accordé CHF 177'664
http://p3.snf.ch/Project-146727
UniNEws No 32
Droit de la santé :
l'Institut a 20 ans !