Communiqué
Pollinisation : abeilles sensibles à la nicotine
15 août 2014
S’interrogeant sur le déclin des abeilles domestiques, des chercheurs explorent la piste de la nicotine, une substance naturellement présente dans le nectar de certaines fleurs. Actuellement post-doctorante à l’Université de Neuchâtel, la biologiste Angela Köhler a examiné la sensibilité des abeilles à miel à ce composé dans le cadre d’un travail mené à l’Université de Pretoria (Afrique du Sud). Elle en rappellera les grandes lignes lors du symposium international sur les interactions entre insectes et plantes (SIP 15) qui se tiendra du 17 au 22 août à l’Université de Neuchâtel. Quelque 200 participants sont attendus pour assister aux 70 présentations orales et découvrir une centaine de posters.
Substance addictive par excellence, la nicotine n’est pas uniquement prisée par les humains adeptes du tabac. Elle fait aussi partie du régime de certains insectes pollinisateurs, comme les abeilles. On trouve ainsi de la nicotine chez bien des Solanacées, famille qui, outre le tabac, regroupe les tomates, les pommes de terre et les pétunias. Bien que toxique, ce composé est un alcaloïde qui, à ce titre, possède également des vertus antimicrobiennes. Idéale donc pour servir de toxine modèle. Ce à quoi s’est employée Angela Köhler en terre africaine. La chercheuse a observé l’influence de la nicotine à différentes doses sur le métabolisme d’abeilles à miel de l’espèce Apis mellifera scutellata.
«Si les concentrations de nicotine que l’on trouve naturellement dans les fleurs n’ont pas de conséquence pour les abeilles, il apparaît que ces dernières sont clairement repoussées par un nectar présentant des taux de nicotine élevés», commente Angela Köhler. Pourtant, cet effet répulsif ne serait pas forcément contre-productif pour la plante. Selon certains chercheurs, il viserait même à améliorer la qualité de la reproduction en poussant l’insecte pollinisateur à ne pas trop s’attarder sur une même fleur, ce qui est toujours positif pour assurer un bon mélange de gènes et éviter ainsi l’excès de consanguinité pour la descendance de la plante.
La jeune biologiste a également mis en évidence que des individus auxquels on a inoculé une simulation d’infection bactérienne (via des lipopolysaccharides) voyaient leur état se détériorer encore davantage. Dans de rares cas cependant, un régime à base de nicotine parvenait à prolonger la survie d’ouvrières affaiblies par une maladie du couvain ou par l’acarien parasite Varroa destructor.
Organisatrice du 15th International Symposium on Insect-Plant Relationships (SIP 15), l’Université de Neuchâtel poursuit ses activités sur les substances volatiles et leur rôle dans les interactions entre insectes et plantes, dans le sillage du Pôle de recherche national Survie des plantes qu’elle avait piloté durant douze ans et qui s’est achevé en mars 2013.
Durant ce symposium, il sera question de l’importance des insectes dans l’agriculture, de pollinisateurs, de papillons, du rôle primordial des odeurs, de vecteurs de maladies des plantes, ou encore de stratégies de protection des plantes face aux ravageurs. La thématique de SIP 15 tourne largement autour du concept d’écologie chimique qui a pour objectif d’étudier comment les organismes utilisent des substances chimiques pour interagir entre eux et avec leur environnement. L’écologie chimique est l’un des neuf domaines-clés de l’Université de Neuchâtel.
Contact :
Dr Angela Köhler
Laboratoire d’écologie chimique
Tél. +41 32 718 31 64 (English / Deutsch)
[email protected]
Photo : Christian W.W. Pirk, University of Pretoria
En savoir plus :
Angela Köhler, ‘Toxic nectar’: harmful and beneficial effects of nicotine on an important pollinator, the African honey bee, SIP 15, August 18, 2014, Neuchâtel
Symposium SIP 15: www.unine.ch/sip15