Communiqué de presse
des plantes pour fabriquer des protéines "médicales"
Neuchâtel, le 27 février 2007. Un groupe du Pôle de recherche national (NCCR) Survie des plantes s'investit dans l'agriculture moléculaire, une approche alliant biotechnologie et agriculture qui consiste à cultiver des plantes pour des applications pharmaceutiques. A l'Université de Neuchâtel, des chercheurs mettent au point une méthode utilisant la voie végétale pour la production de protéines recombinantes, molécules servant de principe actif à de nombreux médicaments.
L'équipe du Prof. Felix Kessler, directeur du laboratoire de physiologie végétale, s'intéresse au fonctionnement des chloroplastes, bien connus pour leur rôle central dans la photosynthèse. Mais ces organelles situées dans les cellules végétales cachent d'autres potentialités, comme la possibilité de stocker des protéines en grande quantité sur les plastoglobules, qui sont des gouttelettes lipidiques présentes dans les chloroplastes. Une application que les chercheurs décrivent dans la revue scientifique BMC Biotechnology*.
Cette propriété devrait susciter l'intérêt de l'industrie pharmaceutique. En effet, des médicaments comme l'insuline destinée aux patients diabétiques, ou les interférons contre la sclérose en plaques, ou encore l'EPO utilisé en cas de grave anémie sont basés sur des protéines dite recombinantes. La technologie recombinante consiste à modifier l'ADN d'une cellule de manière à ce qu'elle opère la synthèse d'une protéine donnée. On met ensuite ces cellules en culture, afin d'obtenir une production massive de la protéine. Actuellement, la production de protéines recombinantes repose sur la culture de levures, de bactéries et de cellules d'insectes ou de mammifères.
Ces procédures présentent toutefois des désavantages en termes de coûts et de risques de contamination par des pathogènes qui affectent aussi l'homme. Le recours à des plantes se profile dès lors comme une alternative prometteuse, car il permet de s'affranchir de ces risques, tout en réduisant les coûts d'un facteur 10 à 100.
Sous la direction de Felix Kessler et avec le soutien du NCCR Survie des plantes, Pierre-Alexandre Vidi et Claire Bréhélin ont démontré l'avantage d'utiliser les plastoglobules, par rapport à d'autres éléments des chloroplastes, pour le stockage de protéines. Dans ce processus, on se sert de plantes génétiquement modifiées pour synthétiser des protéines "médicales" qui vont s'accumuler à la surface des plastoglobules. Puis - et c'est là l'un des points forts de la technologie - les protéines peuvent être aisément isolées par séparation de phase, une opération semblable à l'écumage de la crème se formant à la surface du lait. Autre avantage, précise Claire Bréhélin: "l'environnement hydrophobe offert par les plastoglobules pourrait permettre de synthétiser des protéines qu'on n'arrive pas à fabriquer de façon satisfaisante pour l'instant dans les systèmes classiques de production."
Les chercheurs ont développé leur méthode avec la plante modèle Arabidopsis. L'étape suivante vise à tester le système des plastoglobules sur des plantes cultivées à larges feuilles (qui sont riches en chloroplastes), telles que le tabac, afin d'obtenir une production à plus grande échelle.
*Plastoglobules: a new address for targeting recombinant proteins in the chloroplast
Pierre-Alexandre Vidi, Felix Kessler and Claire Brehelin; BMC Biotechnology 2007, 7:4
Contact
Prof. Felix Kessler
Université de Neuchâtel (Suisse)
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